Entretien #2 – Valentin – 26 ans – Informaticien – 37210 – France – Porsche 912 – Light Ivory – 1965
Valentin est l’heureux propriétaire d’une 912 première série de 1965. C’est sous un ciel bien capricieux qu’il nous a convié à une ballade à travers le vignoble de Vouvray dans la campagne Tourangelle.
Depuis combien de temps possédez-vous cette Porsche 912 ?
J’ai eu cette voiture à l’âge de 13 ans.
Ce n’est pas un peu jeune pour conduire ?
Je fais du modélisme avec mon oncle depuis ma plus tendre enfance. On est copains comme cochons. Il entasse tout un bric à brac pour bricoler, dont des autos. Un jour, nous étions en train de fabriquer une voiture télécommandée avec un moteur de tondeuse 🙂 et nous avons eu besoin de pièces. Au fond de l’atelier j’ai découvert cette vieille Porsche et mon oncle me l’a tout simplement donnée.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette 912 ?
C’est une première série de 1965, Light Ivory, 3 compteurs et 5 vitesses. Mon Oncle a acheté la 912 en 1974 à un CRS muté en Corse. Le type était dans l’urgence et bradait tout avant de partir. C’était une deuxième main. En 1974 elle avait déjà 9 ans et était dans un piteux état. Les planchers étaient bien attaqués et la carrosserie plus toute fraîche. Mon oncle a peu roulé avec. Il était bricoleur et comme c’était la mode à l’époque, il se lança dans une modification en 911 RS. Il démonta la voiture, découpa les ailes pour les élargir, colla un aileron queue de canard, etc… Mais le projet traîna dans la grange. La 912 tomba plus ou moins dans l’oubli pendant presque 30 ans sous une épaisse couche de poussière.
Quels travaux avez-vous effectués sur l’auto ?
On partait d’une base pas très fraîche, bidouillée, partiellement démontée et qui avait passée 30 ans dans une grange. Il a donc fallu se relever les manches ! L’auto est matching et a très peu de kilomètres du fait de sa longue hibernation. Heureusement mon oncle ne jette rien. Il avait gardé toutes les pièces d’origine, encore fallait-il remettre la main dessus ! Avec l’aide précieuse de ce dernier et de mon père, j’ai commencé à gratter tout ce que je pouvais : planchers, intérieur, blaxon etc… et démontage de tout ce qui restait sur l’auto. Puis à 16 ans, les hormones faisant leurs œuvres, je me suis plutôt intéressé aux filles qu’aux Porsche. J’ai repris le chantier vers mes 20 ans. On décida alors de remettre l’auto dans sa configuration d’origine. En ce qui concerne la carrosserie je manquais cruellement de place et d’expérience. Il y avait vraiment beaucoup de travail en particulier sur les ailes puisqu’il fallait reformer et souder pour revenir aux ailes d’origine. Mon père a fait appel à ses relations professionnelles pour me trouver un carrossier compétent. Le premier a eu la fâcheuse idée de mettre sa jambe sous son motoculteur juste avant de commencer le chantier. Il a fallu en trouver un autre. Ayant un travail plutôt souple j’ai donné la main à l’atelier très régulièrement en fin de journée et le soir pendant environ 6 mois. J’ai aussi beaucoup travaillé sur l’aspect mécanique, qui est mon domaine de prédilection. Rectification du volant moteur, tous les joints moteurs et carburation, segmentation, rodage de soupapes, courroie, faisceau, bougies, vis platinées etc… Les connaissances de mon père et de mon oncle m’ont évitées les nombreuses erreurs du débutant. Sans eux je ne sais pas si j’aurais pu aller au bout du projet. J’ai récupéré quasiment tout l’intérieur de la voiture d’origine : compteurs, sièges, tableau de bord, volant, levier, pédalier. Tout a été décapé, nettoyé, lustré. L’auto garde ainsi une très belle patine qui lui confère un charme unique.
Comment utilisez-vous l’auto ?
C’est une auto de loisir avant tout. Avec elle je veux pouvoir rouler librement. Quand j’ai un trou dans mon emploi du temps au milieu de la journée, je vais faire un tour de 30 ou 45 minutes, juste pour le plaisir. Les petites routes autour de chez moi me procurent beaucoup de satisfaction. Le dimanche je fais souvent des parcours plus longs avec ma compagne.
Qu’aimez-vous le plus sur cette auto ?
C’est une propulsion : ça pousse ! J’aime rentrer dans un virage un peu trop vite, rétrograder et entendre rugir le frein moteur, puis remettre les gaz à mi-parcours pour en sortir. C’est comme ça qu’elle s’exprime le mieux. J’aime son odeur d’essence. C’est une auto relativement confortable pour son âge. Elle fait souvent des caprices car elle a 49 ans mais j’aime mettre les mains sous son capot pour régler les problèmes sur la route. Avec elle je voyage dans le temps et l’espace.
Quels autres véhicules possédez-vous ou avez-vous possédées ?
J’ai eu plusieurs Golf et Polo pour rouler tous les jours ainsi qu’une Seat Alhambra. Pas très glamour mais bien pratique.
Que pense votre entourage de cette passion ?
Ma compagne subit cette folie. Elle est patiente ! Pour le reste on peut dire que la voiture ne passe pas inaperçue dans le paysage local…
Êtes vous prêt à vous séparer de votre 912 ?
Jamais ! Même contre une forte somme d’argent. Je ne veux pas me retrouver à 60 ans en train de montrer des photos de ma 912 et m’entendre dire « Regarde la belle auto que j’avais quand j’étais jeune et que j’ai été trop c.. de vendre pour un billet ! » Je ne veux pas subir ce regret. Je ressens comme une responsabilité face à cette voiture de presque 50 ans d’âge. Je crois que je préférerais la transmettre à quelqu’un qui en prendra soin comme on l’a fait pour moi.
Avez-vous d’autres projets ?
La 912 ne sera jamais finie. Même si elle roule bien il y a toujours à faire. Mais j’avoue que je passe beaucoup de temps en ce moment à chasser la bonne affaire. Je suis en train de récupérer une moto Honda 400 Twin des 70’s. Tout dernièrement j’ai raté une Porsche 914 mais je ne suis pas fermé sur un modèle ni même une marque. Je crois que c’est comme la 912, celle qui tombera dans mes mains sera la bonne.
Entretien 912 #2 de Valentin par Antoine Gaslais pour le 912Club. Mars 2013.
Merci à Valentin pour cette belle balade dans les vignes sous la pluie.
Photos © Antoine Gaslais – Mars 2013.